La manifestation commençait à 18h30 place du Capitole. Finissant à 18h en périphérie de la ville, je suis bien sur arrivé en retard, mais seulement de 1 ou 2 minutes. Le cercle était déjà formé et la lumière déjà allumée. Je me suis d'abord posé à l'extérieur, puis une dame m'a fait un peu de place pour que je m'insère, malgré mes signes de "laisser tomber".

C'était une expérience bizarre. J'ai connu mon lot de manifestations, mais jamais comme ça. En général, on défile, on forme une ligne, on crie, on siffle, on hurle des slogans, on chante des rengaines, on change de place, on discute. Là, rien de tout ça. Un cercle fermé, immobile, silencieux. Un seul point de focalisation qui ne change pas. Sans les voitures et les travaux alentours, je pense que ça aurait été un poil effrayant.

Petit à petit, d'autres gens sont arrivés. Certains sont resté à l'extérieur, d'autres se sont inclus et ont agrandi le cercle. La pluie s'est mise à tomber. d'abord tout doucement, sans qu'il devienne nécessaire de se protéger, puis avec plus de force. Les parapluies se sont ouverts et ont été partagés. Alors que Samantdi chantait dans sa tête "Il pleut sur Nantes, donne-moi la main/ Le ciel de Nantes rend mon cœur chagrin.", pour moi, c'était "un p'tit coin de parapluie contre un coin de paradis, elle avait quelque chose d'un ange".

En fait, on ne s'en rend pas forcement compte, mais rester sans bouger pendant une heure, c'est assez fatiguant. Surtout quand on doit en plus porter un grand parapluie à bout de bras. En plus, tournant le dos au capitole, je n'avais aucune idée de l'heure qu'il était. Aucun point d'arrivée dans l'espace, aucun point d'arrivée dans le temps. L'esprit a tendance à partir dans tous les sens dans ces moments là. Heureusement qu'il se passait des choses de temps en temps. J'ai vu Alain changer de place pour prendre une photo. J'ai repéré Samantdi sous son parapluie vert-pomme. J'ai senti mon portable vibrer de nombreuses fois dans ma poche.

Et surtout, nous avons eu la visite d'un SDF, encore jeune, accompagné de son chien. Il est resté un moment dans le cercle, sans doute pour voir de quoi il s'agissait. Puis il est entré, s'est approché de la lumière, a hésité un peu et a continué sa traversée, nous traitant au passage de "faux jetons" et "d'électeurs de Sarkozy". Personne n'a réagi de manière visible. Je pense que tout le monde l'a ignoré royalement.

A la fin de l'heure, alors que la pluie s'était calmé et les parapluies s'étaient refermés, un des moines est sorti du cercle pour éteindre et récupérer la lumière du centre. D'une inclinaison du buste, il a aussi remercié tous les participants. Tout le monde s'est alors séparé. Je suis allé rejoindre Alain et Samantdi pour leur dire bonjour. Je suis arrivé juste à temps pour empêcher Alain de médire de moi. J'ai pu voir que les vibrations de mon téléphone venait d'un message envoyé par Alain.

Le temps menaçait encore, nous sommes alors chacun reparti de notre coté. Je vous invite à lire le compte-rendu de Samantdi et celui d'Alain.