J'y étais mais c'est beaucoup moins prestigieux qu'à Austerlitz. Je vais quand même vous raconter.

Il y avait donc place de la mairie quelques dizaines de supporters de Sarko, et un peu moins de dangereux - gauchistes - staliniens - conservateurs - anti - libéraux - rétrogrades venus manifester leur désaccord.  

Il y avait non loin de moi un groupuscule d'une quinzaine de lycéens dangereusement armés d'une banderole où était écrit "moins de prof = plus d'échec" Un observateur attentif perché dans le beffroi de l'hôtel de ville et muni de jumelle a du sursauter en observant la foule. Il a immédiatement délégué trois archers en civil pour réprimer ce crime de lèse-majesté. Les adolescents ont été fort impressionnés par la demande "ferme et courtoise" qui leur a été faite, après mise à l'écart, de rendre leur arme. (Il n'y avait même pas le moindre manche à balai pour tenir le drap sacrilège.) Cet objet redoutable pour la sécurité de notre bien aimé président fut rapidement roulé en boule et enfoui dans l'ample vêtement du sbire.

Dès que les jeunes ainsi délestés rejoignirent leur place, les protecteurs de la démocratie restant à côté au cas où, je m'approchais des facteurs de désordre pour leur expliquer que s’ils étaient venus faire de la peine à notre honorable président, "ils n'avaient plus qu'à se casser pauvres cons" selon une formule protocolaire. Les défenseurs de la république écoutaient attentivement mon rappel à l'ordre et ont compris, presqu'aussi vite que les jeunes, qu'il n'y avait là qu'ironie, blasphématoire. Ils se mirent à me couver d'un regard tendre.

Quand notre excellentissime président arriva enfin sous un harmonieux mélange d'applaudissements, de quolibets et de sifflets (nous l'attendions depuis 3/4 d'heures mais l'exactitude n'est que la politesse des rois) deux des trois clampins vinrent prendre position entre l'exécrable trublion que j'étais et la rangée d'adorateurs alignés derrière les barrières. Ainsi n'ai-je aperçu le sourire crispé de Nicolas qu'entre les jambes du gardien de l'ordre. J'avoue que je me suis dégonflé devant la rapidité et l'efficacité du service de sécurité et que je n'ai pas osé déployer la pancarte dissimulée sous ma veste de pluie. "Retraites, service public, pouvoir d'achat, casse-toi Nicolas" Elle est encore toute neuve. Elle resservira.

par Tollini, pere de TarValanion